Informe Affaires - Édition Novembre 2016 - page 19

INFORME AFFAIRES,
Le MENSUEL
économique d’ici •
NOVEMBRE 2016 • 
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et faire évoluer la recherche et le dé-
veloppement technologique » assure
le chercheur.
ICSOBA a le mandat de propager les
connaissances mondiales sur l’alu-
minium. Présenté pour la 2e fois seu-
lement au Canada, l’événement a
réuni des spécialistes provenant des
grands producteurs mondiaux, mais
également de plusieurs universités et
centres de recherche d’une vingtaine
de pays. Vinko Potocnik avance que
la qualité des présentations de cette
année était exceptionnelle. « Cette
année, comme en 2015, les présen-
tations avaient été préparées avec
beaucoup plus de rigueur que par les
années passées. Le contenu, très
technique, était de haut niveau.
Une incursion dans la région
D’ailleurs, avant d’autoriser les présenta-
tions, un panel d’experts les évaluent et
les « formatent » pour s’assurer, notam-
ment, que les conférences ne contiennent
pas d’éléments promotionnels », lance le
scientifique. Plus de 300 personnes ont
participé d’une façon ou d’une autre à
l’événement. Dans le cadre d’ICSOBA
2016, les congressistes avaient été invi-
tés à visiter l’usine d’électrolyse de Rio
Tinto d’Alma, celle de production d’alu-
mine de Vaudreuil à Jonquière ainsi que
le pont d’aluminium.
Parmi les nombreux phénomènes qui sont venus bou-
leverser l’industrie de l’aluminium ces les dernières an-
nées, il y en a un qui, à mon avis, n’a pas retenu toute
l’attention qu’il mérite : aujourd’hui, près de 70 % de
l’aluminium produit dans le monde l’est par des sociétés
d’État qui appartiennent directement ou indirectement à
des gouvernements (la Chine, les pays du Moyen-Orient,
etc.) et non pas à des actionnaires privés.
De plus, on observe que cette proportion d’« aluminium
public » continue de s’accroitre avec les années, au point
ou le modèle d’affaires « entreprises privées » auquel
nous sommes habitués en Amérique du Nord, avec des
géants comme Alcoa ou Rio Tinto Alcan, est maintenant
devenu l’exception et non plus la règle…
Cette nouvelle réalité entraine d’importantes consé-
quences. D’abord, les états qui s’impliquent directement
dans la production d’aluminium le font en très grande
partie pour mettre en œuvre des politiques de dévelop-
pement économique régionales légitimes et non pas
uniquement en fonction de critères de rentabilité écono-
mique (comme le font les grandes entreprises).
Au lieu d’actionnaires qui s’attendent à des profits tous
les trois mois, les gouvernements producteurs d’alu-
minium ont développé des contrats sociaux avec leurs
populations, et s’il y a des pertes, ces mêmes gouverne-
ments les assument au travers de leurs autres fonctions/
revenus d’État. Cela place une compagnie comme Rio
Tinto dans une perspective nouvelle : par exemple, le prix
de vente qu’est prête à accepter une société d’État pour
son aluminium n’est pas uniquement déterminé par des
calculs économiques et se retrouve donc souvent en bas
du prix coutant réel, ce qui, dans le système capitaliste
normal, est une pratique illégale appelée « Dumping ».
De plus, ces gouvernements vont souvent construire de
nouvelles alumineries plus rapidement que ce que le
marché peut absorber, ils vont aussi maintenir en acti-
vité des alumineries dont les coûts de production sont
plus élevés que le seuil de rentabilité économique, etc.
C’est ce qui explique en bonne partie le fait que, bien
que le marché de l’aluminium soit en croissance, les
prix sont depuis plusieurs années extrêmement bas (et
souvent plus bas que le prix de reviens).
Mais comment réagir quand plus de 70 % de l’alumi-
nium disponible n’est plus vendu selon des critères éco-
nomiques ? Face à des prix structurellement plus bas
que les coûts, de très grandes entreprises mondiales
comme BHP Billiton, Anglo-American ou Alcoa ont carré-
ment fermé de très grandes proportions de leurs usines
sur la planète …Rio Tinto Alcan ayant les coûts d’éner-
gie les plus bas du monde grâce à ses réseaux élec-
triques privés de Kitimat et
du Saguenay-Lac-St-Jean, a
réussi jusqu’à présent à mainte-
nir sa production au Québec et en Co-
lombie-Britannique, en abaissant très significativement
ses autres coûts inhérents. De plus, Rio Tinto Alcan est
devenue, par la force des choses, un producteur dit de
« niche », c’est-à-dire de certains produits à volume plus
limité, mais plus payant (notamment les alliages spé-
ciaux d’aluminium de qualité). Ces stratégies ont permis
jusqu’à maintenant à Rio Tinto Alcan de maintenir sa
production, mais en diminuant radicalement les impacts
économiques générés par ses activités au Québec.
Devant l’accroissement continu de la proportion mon-
diale d’aluminium « politique » versus l’aluminium
« économique », la question majeure pour l’avenir
est comment des compagnies privées, si grandes
soient-elles, pourront continuer à opérer à profit dans
un tel contexte ? Déjà, plusieurs analystes sont d’avis
qu’Alcoa pourrait même ne plus exister d’ici une décen-
nie ! Les bas coûts énergétiques ont permis au Québec
de prospérer dans l’industrie mondiale de du métal
gris, la nouvelle réalité de l’aluminium « politique » vient
poser tout un défi à cette industrie si stratégique pour
le Québec et notre région.
Roger Boivin est issu d’une famille d’entrepreneurs établie à La Baie depuis sept générations. Sa carrière de plus de
trente ans en développement économique l’a amené à oeuvrer aux niveaux municipal, régional, québécois et cana-
dien. Depuis 10 ans, il est président du Groupe Performance Stratégique, une firme spécialisée en développement
économique, communications et conseils stratégiques. À ce titre, il a été au cœur de la stratégie «ON Y VA» des tra-
vailleurs d’ALCAN ayant conduit à l’établissement au Saguenay de l’usine AP-60, il a contribué significativement à la
stratégie ayant conduit au redémarrage de la papeterie de Dolbeau-Mistassini et a recruté la compagnie Américaine
Century Aluminium qui a récemment étudié le projet d’implanter une aluminerie dans la MRC Maria-Chapdelaine.
70 % de l’aluminium mondial est désormais produit par des gouvernements !
AluQuébec compte sur l’expertise iné-
galée d’un réseau de centres de re-
cherche, de développement et de for-
mation dont les travaux portent d’une
façon ou d’une autre sur la production
et la transformation de l’aluminium. Il
comprend des universités et regrou-
pements de chercheurs universitaires,
des centres de liaison, des centres
collégiaux de transfert de technologie,
des laboratoires privés et gouverne-
mentaux ainsi qu’un comité sectoriel
de main-d’œuvre.
L’expertise combinée de ces institu-
tions de haut savoir, des laboratoires,
des travailleurs qualifiés et des utili-
sateurs d’aluminium permet de dé-
velopper des solutions performantes
et novatrices en réponse aux besoins
de toute entreprise désirant intégrer
l’aluminium dans ses produits ou pro-
cédés de production. Ces centres de
recherche font du Québec la capitale
mondiale de l’expertise en matière de
production, de transformation et d’utili-
sation de l’aluminium.
Les voici :
Alcoa Innovation
Centre de métallurgie du Québec
(CMQ)
Centre de recherche industrielle du
Québec (CRIQ)
Centre de recherche sur l’aluminium
(REGAL)
Centre de technologies avancées
BRP – Université de Sherbrooke
Centre des technologies de l’alumi-
nium (CNRC-CTA)
Centre québécois de recherche et
de développement de l’aluminium
(CQRDA)
Comité sectoriel de main-d’œuvre de
la métallurgie du Québec (CSMO-M)
CRDA Rio Tinto Alcan
CURAL
Recherche et
développement au Québec
- Source: AluQuébec
Vinko Potocnik est docteur en physique, diplôme qu’il a obtenu
de l’Université de Colombie-Britannique. Il est un spécialiste reconnu
mondialement de la production d’aluminium primaire et qui parle
couramment huit langues. Cet ingénieur de carrière a œuvré 28 ans pour
Alcan (CRDA). Officiellement à la retraite depuis 2001, il n’a cependant
pas chômé depuis puisqu’il est consultant pour différentes entreprises à
travers le monde. Il est notamment lié depuis neuf ans à Emirates Global
Aluminium (EGA), à Dubaï. L’homme est très apprécié par les émiratis;
ils lui ont décerné, en mars 2016, « Le Prix Rashid » qui souligne
l’innovation et l’excellence dans le travail.
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