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Communiqué de Presse

MONTRÉAL - La bourse du carbone, à laquelle participent le Québec, l'Ontario et la Californie aura un impact négligeable sur les émissions de gaz effet de serre (GES) tout en entraînant des pertes de milliards de dollars pour les économies québécoises et ontariennes, montre une publication lancée aujourd'hui par l'IEDM.

Les prix sur le marché du carbone devront augmenter de façon importante pour que les gens et les entreprises adoptent de nouvelles façons de faire. Or, même avec un prix du carbone prévu de 30 à 100 $ la tonne en 2030 (comparé à environ 20 $ aujourd'hui), aucun changement notable ne se produira. « Les gens vont simplement payer plus cher et continuer à émettre presque autant de GES », dit Germain Belzile, chercheur associé senior à l'IEDM et coauteur de la publication.

Une hausse du prix du carbone à 93 $ en 2030, par exemple, ne permettrait d'atteindre qu'un cinquième de la réduction souhaitée, selon une évaluation du ministère des Finances du Québec. Cela ferait néanmoins augmenter le litre d'essence de quelque 20 cents. « Ce serait choquant, mais vous ne vendrez pas votre voiture pour ça et, toutes autres choses étant égales, les émissions ne baisseront pas beaucoup », explique Germain Belzile.

Aussi, selon l'évolution actuelle du prix du carbone, l'argent qui sert à acheter les droits d'émission nécessaires sera envoyé… en Californie. En effet, si les prix du carbone demeurent peu élevés, c'est qu'il y aura d'importants surplus de droits d'émission. Et si le Québec et l'Ontario ont besoin d'acheter plus de droits d'émission, c'est forcément la Californie, un marché beaucoup plus grand, qui en aura à vendre.

La Vérificatrice générale de l'Ontario évalue d'ailleurs que les fuites financières annuelles de cette province vers la Californie seront de 470 millions $ en 2020 et de 2,2 milliards $ en 2030. Le Québec sera vraisemblablement dans la même situation.

Augmenter le prix des émissions, par exemple en imposant une taxe très élevée sur le carbone, ne réglerait pas le problème. « Si le prix du carbone est plus élevé que ce que les entreprises peuvent payer, elles déplaceront leurs activités vers des endroits où la réglementation des émissions est moins sévère, réduiront leurs activités ou même fermeront leurs portes. À ce moment, ce sont des emplois qui disparaîtront », explique Mark Milke, analyste en politiques publiques indépendant et coauteur de la publication.

Pour qu'un mécanisme tel que la bourse du carbone réussisse à faire diminuer les émissions de GES, il ne doit pas être limité à trois territoires qui ne représentent qu'une petite partie de l'économie nord-américaine. Sinon, cela soulève des questions quant à la pertinence même pour le Québec et l'Ontario d'y prendre part. « Ce n'est pas en envoyant des capitaux ou des emplois à l'étranger que le Québec et l'Ontario vont réduire les émissions de GES », rappelle Mark Milke.

« Si le but des gouvernements du Québec et de l'Ontario est de s'attaquer aux problèmes causés par les changements climatiques, ils devraient adopter une approche globale. Si une telle approche, ou une autre qui englobe au minimum l'Amérique du Nord n'est pas envisageable, on devrait s'en remettre au progrès technologique et à l'innovation. Ça ne prendra pas plus de temps pour atteindre nos objectifs, mais on va au moins cesser le gaspillage », conclut Germain Belzile.

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